Le globe-trotteur anglais, Thos Henley, sort Blonde on Basically Ginger, un disque de piano songs belles à décrocher la lune…
Un piano… et Thos Henley
La nuit tombait à l’improviste, des étoiles plein les yeux. La bouteille de vin circulait de main en main. Encore quelques minutes arrachées au temps qui passe. Je regardai Arnaud en souriant : “on l’a fait, mec… on l’a descendu, ce putain de piano !”. J’avais le dos en vrac et, pour me soulager, je repris une gorgée de vin. Arnaud me rendit mon sourire mais ne répondit rien. Déjà parti, probablement. Le piano, lui, était bien là. Immobile, comme un animal fidèle. D’autant plus déplacé qu’aucun de nous deux ne savait en jouer.
Pour la première fois depuis longtemps, j’étais heureux. Je ne voulais rien de plus. Qui a besoin d’un toit quand il peut dormir sous les étoiles, avec, pour lui tenir compagnie, un ami ivre, une bouteille de Merlot bon marché et un piano désaccordé ? J’avais perdu trop de temps en vaines conquêtes pour ne pas goûter ce moment. Je me levai et m’approchai du piano en titubant… quand une main se posa sur mon épaule. “Je suis musicien”, annonça l’homme avec un fort accent anglais, “je vais faire un disque avec un piano”. Nous passâmes les heures suivantes à jouer et à chanter, comme si nos vies en dépendaient. A mon réveil, plus aucune trace du musicien. Il était parti comme il était venu, cowboy solitaire. Son nom ? Thos Henley.
Thos Henley, dandy de grand chemin ?
J’apprends, il y a quelques jours, la sortie de Blonde on Basically Ginger, le troisième album de Thos Henley. Et, qu’importe si ce ce que j’ai pu écrire est réel ou fantasmé, la musique, elle, est bien là. Blonde on Basically Ginger est un bel album de piano songs, des chansons pop écrites et composées autour d’un piano réel ou imaginaire et qui prennent vie avec un piano – un vrai, cette fois – celui de Mathieu Geghre, entendu sur l’album de O. On pense bien sûr à Billy Joel. Mais, si quelqu’un a inspiré Thos Henley, c’est surtout Paul Williams, compagnon de débauche d’Harry Nilsson et John Lennon dans les années 70, mais surtout immense compositeur de chansons pop et de bandes originales de films.
Rien de tel que le piano pour varier les ambiances et Thos Henley l’a bien compris. Tantôt enjouées, tantôt mélancoliques et rêveuses, ses chansons séduisent d’abord par leur façon bien à elles d’occuper l’espace. Comme si elles revenaient d’un long voyage et posaient leurs valises, quelques instants seulement, avant de redécoller. Henley chante comme un dandy de grand chemin, dans un mélange de grâce et de puissance. On croirait qu’il veut embrasser le monde ou décrocher la lune, rien qu’en chantant. Le plus beau, c’est que, la plupart du temps, il y arrive. Pour ceux qui aiment la musique quand elle ne fait pas semblant, Blonde on Basically Ginger est donc un disque hautement recommandable.