Rover serait donc la révélation de l’année ? Et si, faute de mieux, on avait un petit peu exagéré ?
Lorsque, comme moi, vous aimez déambuler entre les étalages des disquaires, la pochette d’un album est souvent le premier élément qui vous fait entrer en contact avec l’univers d’un artiste. Je me souviens, par exemple, avoir acheté le premier album des Dresden Dolls sur la foi de la pochette, sans jamais les avoir entendus. Idem, il y a quelques jours pour le fabuleux MU.ZZ.LE de Gonjasufi. A l’inverse, il est des pochettes de disque qui vous inspirent une immédiate répulsion et vous dissuadent d’aller voir plus loin. La mine patibulaire d’un grand gaillard hirsute et peu avenant avait anéanti sur le champ toutes mes velléités d’entrer dans l’univers de Rover. Avouez qu’en matière de visuel, on peut difficilement faire plus prétentieux. Moi, ma gueule en grand, arborant un air de supériorité aristocratique. Rover a beau affirmer que son expression sur la pochette reflète l’exigence qu’il a vis-à-vis de la musique, je n’y vois que forfanterie et égocentrisme. Mais devant les flots d’enthousiasme béat et les torrents de dithyrambes qu’inspirait Rover à mes confrères, je suis passé outre ma réticence initiale et me suis mis en devoir d’écouter l’album dans son intégralité afin de vous livrer ici mon sentiment.
Hélas, force est de constater que le contenu ne fait que confirmer l’impression laissée par l’emballage. En matière de pompage, Rover ne nous épargne rien. Bowie, Radiohead, Muse, Jeff Buckley, tout y passe. On a déjà tellement tout entendu qu’on se croirait dans un musée. Le défaut majeur de ce disque, c’est qu’il manque cruellement de personnalité. Du début à la fin, Rover reste empêtré dans ses influences, comme un petit enfant dans des vêtements trop grands pour lui. Certes, les mélodies ne sont pas désagréables et le garçon chante très bien. Trop bien peut-être, car à force de vouloir faire montre de sa remarquable technique vocale, il passe à côté de l’essentiel : l’émotion. Rover use et abuse de cette voix de tête qui, employée sans clairvoyance, m’a vite lassé. Ce n’est pas un hasard si l’un des rares morceaux qui, à mon sens, échappe au naufrage est Full of Grace (et le morceau caché qui lui succède), presque intégralement chanté dans les graves. Là où certains journalistes voient du lyrisme, je ne vois que prétention et grandiloquence. Là où ils voient l’émergence d’un nouveau talent, je ne vois que des journalistes empressés qui s’emballent devant le premier chanteur pop français un tantinet doué.
Il y a des qualités évidentes dans ce premier album mais, malheureusement, le manque de modestie de l’ensemble aboutit à un gâchis colossal. Rover n’est pas dénué de talent. Il se trouve simplement que ce talent est mal exploité. Qu’il se coupe les cheveux, sourit un peu, se détache davantage de ses influences et simplifie son chant et il se pourrait bien que son prochain album soit véritablement excellent. Pour le moment, on en est encore bien loin et ce premier disque a les qualités et surtout les défauts d’un brouillon, n’en déplaise à mes confrères…Si Rover ne change pas rapidement de trajectoire, il pourrait très vite finir à la casse.
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