Je ne connais pas Arman Méliès. Enfin, je veux dire, je ne le connais pas personnellement. Mais, quand je vois que nous partageons la bagatelle de 31 amis Facebook, je me dis : voilà un sérieux candidat pour mon prochain déménagement.
Je sais qu’il ne refusera pas. Les amis de mes amis sont mes amis. Et puis Arman est un garçon sympa. La preuve : quand il a sorti son dernier album, en mars dernier, il a pris soin de m’en adresser un exemplaire. Comme ça, gratuitement. Depuis, il doit se demander si je l’ai bien reçu. Pas un mot, même pas un merci. Désolé Arman, je suis impardonnable.
J’aimerais bien trouver une excuse qui tienne la route pour justifier ces six mois de silence. Un truc imparable du genre “je me suis cassé les deux poignets, je ne pouvais plus taper à l’ordinateur” ou encore “j’ai passé la moitié de l’année dans une yourte pour dialoguer avec mon moi intérieur”. Mais la vérité, c’est que j’avais égaré ton disque. Lors de mon dernier déménagement. Quand je te dis que j’ai besoin d’aide…
Et puis, ce matin, je me suis réveillé avec une idée fixe : retrouver et chroniquer cet album. Balançant tout ce qui faisait obstacle à ce grand dessein, frôlant de près le drame conjugal, m’arrêtant, exaspéré, au bord de l’infanticide, à deux doigts d’allumer Mon plus bel incendie, j’ai fini par mettre la main sur le précieux objet.
Redécouvrir IV à cette période de l’année n’a rien d’incongru. L’esthétique froide de l’album colle parfaitement à la saison. Après quatre années de silence discographique, quatre années passées à collaborer avec Bashung, Thiéfaine ou Julien Doré, Arman Méliès offre une nouvelle peau à ses compositions. Nul doute que ses échanges avec d’autres artistes ont joué dans cette nouvelle orientation. Sur ce quatrième album, les synthés éclipsent partiellement les guitares et font entrer la pop classieuse d’Arman Méliès dans une ère nouvelle. L’Art perdu du secret organise la passation de pouvoir entre organique et synthétique. Mon plus bel incendie figurera sans doute dans les anthologies de la pop made in France.
Cryogénisées dans leurs blocs de glace synthétiques, les mélodies fragiles d’Arman Méliès gagnent en solidité, en épaisseur. En faisant exploser les carcans classiques, Silvaplana illustre à merveille ce nouveau paradigme. Tout (ou presque) est dit sur ces 10 minutes qui naviguent habilement entre pop obsédante et exploration électro. Avec cet album, Arman Méliès se donne de l’air, se réinvente et ringardise aussi bien les années 80 que ceux qui s’en réclament aujourd’hui.
Arman aura mis quatre ans à le sortir et moi, six mois à le retrouver. Mais AM IV trône désormais au sommet de ma pile de disques et devrait y rester un bon moment. Il a, en plus, le bon goût d’assassiner les Daft Punk, même si ce n’est qu’en clip. Que demander d’autre ? Un petit coup de main pour le prochain déménagement ?